Avec/With Dean Inkster (1999)
Remake du film de Guy Debord / Remake of Guy Debord’s film sous forme de performance installation
Avec/With Dean Inkster (1999)
Remake du film de Guy Debord / Remake of Guy Debord’s film sous forme de performance installation
published in 1994 for the Ken Jacobs retrospective at the American Center in Paris and in the Oberhausen catalogue (42ème international – short film festival, 1996) for the Ken Jacobs presentation : « Das Kino Als Geisterbild ».
Ken Jacobs is one of the most important figures in American experimental film. For more than 35 years, he has questioned the nature of moving pictures in a variety of approaches. Whatever the genre – film diary, analytical film, « personals film », picaresque film, 3D performance – he is always interested in film as a process of recording and reconstituting (in the projection) an event or a more or less open narrative. The narrative structure is never absent on Ken Jacobs’s films, although some of his works break up the classic form of representation and its narrative traditions. Film replays in the present a time long gone, another life. Cinema as an enterprise producing phantoms and ghosts whose visual performances constitutes its magnificent outcome. A work on the ephemeral and the fragility of the filmic illusion, revealed by Jacob’s installations.
Since his early films, which celebrates a way of living, long gone since, as with Orchard Street or Little Stabs at happiness, 50’s bohemian life in New York city, to the latest performances of electrical shadows, Ken Jacobs has always been the outsider within the experimental film scene. H has always claimed and promoted a free cinema, a cinema close to home movies as those made about Flo’s family for Urban Peasants, and which share the same feeling as some of Ron Rice and Jack Smith. Many of his early works have been done with Jack Smith (even if some times they were done with some disagreement). Ken Jacob’s film mixes styles which until then dispersed, the use of found footage, authorize him to question the narrative in Doctor’s Dream, investigate the notion of authenticity with Perfect Film, out-takes from a film dealing with Malcolm X assassination. With Tom, Tom The Piper ’s Son, themes and variations transformed the narratives codes from a recycle so called primitive film. This recycling of footage is also very active within the performance, a French porno film of the 20’s is used withXCXHXEXRXRXIXEXSX, while Making Light of History : The Philippines Adventureused newsreel. Within the 3D film the history of cinema is present ; as a reference or as a quotation, Lumière’s film within Opening the Nineteenth Century : 1896, Buster Keaton with Keaton’s Cops.
He works by approaching sounds and music as well as recycled and redirected images. This recycling does not stop at his own films which are never completely finish, always work in progress. The soundtrack of Blonde Cobra uses a radio transmission which punctures the stretches of the black silence, is inserted between the sequences in order to oppose the present and the vision of scenes that took elsewhere, long ago. The invasion of parasites into the ghosts of a story that is still to come for the audience of the presence. The characters of the picaresque films are put into question, opened for discussion by the scenes that interrupt the plot, as in Star Spangled to death and The Sky Socialist. His work his always on the periphery, marginal. In With Tom, Tom The Piper ’s Son, it is the rereading of the story, its abstraction, that makes us aware of the details of the images we have missed. Likewise in Perfect Film, where none of the found footage film was modified. By this process of appropriation and naming, Ken Jacobs forces us to exercise a critical view. Ken Jacob always tries to break our seeing habits to make us aware of all that can be contained by in the filmed image. The representation is haunted by a multitude of events we don’t know how to perceive. Only the filmmaker’s insistence – as well as the spectator’s- makes them visible. The ghost images recover shape for all who knows how to take time to look at them.
en français La Furia Umana / 4, rivista di teoria e storia del cinema (in)visioni, vampate fantasticherie e filosofia, avril 2010,
em português : A gente saía de manhã sem ter idéia in Lugar Comun n° 28, Rio de Janeiro, Agosto 2009
Il y a bientôt trois ans, le 4 juillet 2007, mourait José Agrippino de Paula, artiste important de la contre-culture brésilienne qui laisse une œuvre singulière composée de romans, d’une pièce de théâtre et de quelques films.
Œuvre clef de la littérature brésilienne, PanAmérica1récemment traduit en français partageait un grand nombre d’aspirations de la jeunesse brésilienne de l’époque, s’appropriant des pans entiers de la culture américaine. Dans ce roman et dans la pièce United Nations, José Agrippino de Paula , démontait, au moyen de la surenchère, les mythologies quotidiennes produites par l’industrie culturelle.
José Agrippino de Paula est né à São Paulo en 1937. Après des études d’architecture, il séjourne à Rio de Janeiro ou il étudie jusqu’en 64. C’est dans cette ville qu’il écrira son premier roman : Lugar Publico2. Il s’agit d’un véritable roman d’apprentissage dans lequel le choc entre les cultures est patent. Au formidable développement des villes d’Amérique du Sud, correspond une attente de la jeunesse qui cherche dans le cinéma et la musique américains d’autres modèles. La confrontation entre un ordre vacillant et le portrait d’une nouvelle génération qui survit dans une ville que l’on suppose être Rio de Janeiro et qui subit de plein fouet le coup d’état de 64. La description d’une manifestation d’ouvriers, réprimée par l’armée; l’irruption des chars dans la ville désertée et l’annonce du coup d’état à la radio sont incorporés dans le roman. Ils sont des éclats plus saillants dans le récit, mais ne sont pas récurrents, comme le sont d’autres événements ou thèmes comme la mort du père, la question de l’homosexualité et de la prostitution. Le roman multiplie les descriptions de zones urbaines désolées où en plein développement, il est traversé par les dérives d’un groupe protéiforme d’amis qui ont toutes les peines à assurer leur survie. L’intérêt pour le paysage urbain et la mythologie quotidienne est partagé par quelques auteurs brésiliens des années 60, mais chez Agrippino, celui-ci manifeste potentiellement une scénographie qui se déploiera dans les happenings réalisés avec Maria Esther Stockler et dans son film Hitler 3° Mundo. Il reconnaît que sa « formation en architecture à tout à voir avec la scènographie. 3» Dès 61, profitant du théâtre Arena de l’université, il monte une adaptation de Crimes et châtiments.
À son retour à São Paulo, il fréquente l’atelier de Roberto Aguilar4 ou Maria Esther Stockler, répétait un solo. José Agrippino et Maria Esther vivent rapidement ensemble et travaille séparément dans un premier temps ; elle au sein du groupe Móbile5 avec lequel elle monte deux spectacles, lui écrivant ses deux premiers romans. À l’occasion d’un festival produit par le Sesc SP, qui offrait un financement pour un spectacle ils vont travailler ensemble sur une pièce, Tarzan do 3° Mundo. Le spectacle, joué pendant quinze jours; résulte d’une expérimentation menée dans le laboratoire qu’ils mirent en place à cette occasion. Chaque scène faisait appel à un plasticien. Par-delà les différences, Maria Esther remarque l’existence d’une ligne qui a défaut d’être directrice relevait d’une esthétique : celle du collage. La juxtaposition ou la simultanéité des situations présentées façonnait un style singulier. Il s’agit d’un collage «les autorités parlant toujours de choses qui… n’ont pas d’intérêt… ni de sincérité, auxquel…les personnes ne prêtent pas attention… » comme le remarque Maria Esther Stockler6. Il s’agit d’une écriture qui juxtapose des blocs autonomes, ceux-ci sont plus ou moins autobiographiques (références à la mort du père, la vie estudiantine…), ou ils sont l’exploration d’une image, son amplification qui en appelle toujours de nouvelles. La puissance fabulatrice des images participe du rêve et de l’hallucination, issue du langage cinématographique, elle affirme les ruptures et permet les juxtapositions de blocs temporels distincts qui n’ont pas à suivre un développement causal bien défini. La succession d’événements, dans des blocs distincts s’effectuent selon une logique interne qui leur est propre. Leurs juxtapositions déclenchent de nouvelles perspectives et favorisent la multiplicité des raccords, en affirmant leurs virtualités mêmes. C’est parce que les images prolifèrent, fuient qu’elles conduisent à des nœuds de virtualité, que le récit, le film, ou le happening résolvent chacun à leur manière. La prolifération des images répond à un «pop-fantastique» plus qu’à une nouvelle manifestation latine d’un surréalisme fantastique. On peut retrouver ce « pop-fantastique » dans les collages d’Erró des mêmes années ainsi que dans Science Friction(1959) ou Breathdeath (1964) de Stan VanDerBeek, où une mosaïque, un tapis de relations brise la linéarité ou la symétrie de la trame. Chez José Agrippino de Paula, ce phénomène est renforcé par la présence d’un «Je» qui ne s’appartient pas, un Je anonyme, déplacé, qui crée une pluralité de voix, sans qu’aucune domine. On est constamment dans l’oscillation,entre un Je et un autre, dans un temps différé, à venir ou déjà passé. Le temps privilégié est celui qui voit la confrontation et la prolifération des images se succédant au hasard des associations selon des rythmes et des vitesses qui ménagent des trouées, des suspensions dans le déroulement de l’action ou de l’événement. Les blocs sont fréquemment sérialisés dans The United Nations et PanAmérica ; leurs occurrences ne sont pas systématisées, mais relèvent de l’aléa. Zé Agrippino de Paula s’empare du cinéma, à la manière d’un artiste pop, il recycle les icônes du cinéma hollywoodien – Marilyn où Liz -, mais il utilise tout le dispositif cinématographique producteur d’irréalité qu’utilise le poète. «En citant Marilyn Monroe je cherchais à faire comme Warhol: critiquer les mythes quotidiens créer par l’industrie culturelle7.»Les acteurs des films, devenus quasiment nos intimes grâce aux médias, sont à leur tour incorporés dans des fictions. Ce travail rappelle celui de Warhol qui s’approprie des images de stars ou de désastres, les transforme selon des critères qui vont gommer en grande partie les détails de l’image au profit des aplats, pour en faire des icônes qu’il remet en circulation. La multiplication travaille par la copie de copie estompe progressivement le détail du trait au profit de la surface colorée. Chez Zé Agrippino les acteurs deviennent les protagonistes d’un cinéma personnel ; ils sont mis en scène comme un rêve, une hallucination, un délire. Di Maggio, Marilyn Monroe sont des images sans épaisseur, des soldats de plomb qui se baladent dans des décors en constant changement. Ils n’occupent pas l’espace : ils sont à la surface de l’image, prêts à se glisser dans quelque aspérité du récit, du décor. Chez Warhol, Marilyn se démagnétise dans la prolifération chromatique, chez de Paula, elle est une image dont on jouit, sexuellement mise en scène. Il ne s’agit pas du même détournement, bien que tous deux s’inscrivent dans le Pop.L’ouverture de PanAmérica voit la production délirante d’un tournage de la Bible qui évoque la version de Cecil B. de Mille. José Agrippino de Paula, amplifie le mythe de la réalisation du film le transformant en une épopée au service du délire d’un tyran, mis en scène par un auteur que l’on ne peut véritablement déterminer. Le cinéma qui intéresse et qu’apprécie José Agrippino de Paula est le cinéma hollywoodien ; goût qu’il partage avec certains cinéastes underground américains (Kenneth Anger, George et Mike Kuchar et Jack Smith, par exemple), qui voient en Hollywood une source inépuisable d’inspiration. La description des scènes du tournage multiplie les points de vue, selon des vitesses variables, à la manière d’un montage parallèle qui permet de faire exister presque simultanément plusieurs scènes. Cette simultanéité rappelle le fonctionnement du cirque Barnum avec ses trois pistes, qui a sans doute influencé la production des happenings au cours desquels plusieurs événements ont lieu simultanément dans des endroits distincts.
La description des tournages, la polyphonie, la prolifération des points de vue nous mettent au cœur du cinéma. Nous ne sommes plus de simples spectateurs nous agissons, nous produisons notre cinéma. Hollywood n’est plus distant, mais devient un prolongement de notre imaginaire, à partir duquel nous fabriquons de nouvelles images. Cette appropriation du cinéma commercial permet de s’affranchir des règles et du bon goût : on passe de la référence à l’irrévérence avec la plus grande candeur. Des modalités particulières sont à l’œuvre, dans lesquelles la dilatation temporelle et le parcours vertigineux des nouvelles images produites jouent un rôle prépondérant. Dans The United Nations, les protagonistes d’un jeu d’échec géant se mêlent aux acteurs sur le tournage d’une fiction, avec Charles Boyer en Napoléon8. Les scènes ne se déploient que par ce qu’elles sont interrompues par des accidents qui, dans les happenings, sont prévus mais pas totalement maîtrisées. Les interruptions confèrent un style chaotique à la dramaturgie, et c’est ainsi que le metteur en scène «construira un ENVIRONNEMENT magique et fantastique aux moyens de tels accidents». Dans les romans, les interruptions fonctionnent comme des parenthèses autonomes et sont productrices de nouveaux récits. Les manifestations qui précèdent ou suivent le coup d’État, sont dispersées dans le cours de Lugar Publico. Elles se télescopent littéralement aux personnages et les plongent, les fourvoient dans d’autres espaces mentaux. Des personnages récurrents habiteront les récits, les pièces ainsi que le long-métrage : Hitler, le pape, Ché Guevara (dans PanAmérica et The United Nations)… L’écriture cinématographique de Hitler 3° Mundo, comme celle qui préside aux différents happenings, conteste nos habitudes de regarder un film, voir un spectacle ou lire un livre. Ce n’est pas tant le chaos que la production d’un chaosmos9 qui s’impose à travers les artifices romanesques et théâtraux. Nous sommes plongés dans une situation ou l’inconfort, l’impondérable, l‘intempestif, le grotesque, l’obscène, le contestataire sont les vecteurs de la dramaturgie autant que de la forme sous laquelle elle s’énonce. Dans PanAmérica, le réalisme descriptif des scènes de tournage convoque un délire que n’aurait pas reniée le Jack Smith de Normal Love (1963-64) et de Yellow Sequence (1963). Dans ce récit, José Agrippino de Paula, ridiculise et se joue des stars hollywoodiennes. Elles ne sont plus que des caricatures, des rôles travestis. Leur appropriation par et dans le langage de l’artiste préfigure celles de Hitler 3° Mundo, ou celles de Tarzan 3° Mundo et de Rito do Amor Selvagem. Les revendications exprimées s’inscrivent dans le contexte particulier du Brésil qui voit la dictature s’installer en 1964. La consommation et ses mythes sont envisagés de manière plus ou moins critique selon que l’on se trouve d’un côté ou l’autre de l’Atlantique. La réaction devant la prolifération des biens de consommation est ici bien différente de celle que Georges Perec décrit dans Les choses, bien que pour les deux écrivains le règne de l’aliénation manifeste la déshumanisation de l’espèce, fascinée par la spectacularisation et la marchandisation des objets. PanAmerica plus que Lugar Publico décrit l’avènement de la société du spectacle en Amérique du Sud, en confrontant à la réalisation d’un film épique, l’épopée d’un guérillero dans l’Amérique Latine. L’introduction de la guerre froide au sein du roman fait écho aux événements que connaît alors le Brésil10, autant qu’elle manifeste le désir de briser une certaine hiérarchisation qui place l’art populaire et la contemporanéité tout en bas de l’échelle, loin du grand art. José Agrippino de Paula, affirme comme d’autres artistes de son époque, la nécessité de prendre en charge les aspirations et les comportements de sa génération en affirmant la non-séparation de l’art et de la vie.
C’est dans ce sens qu’il faut comprendre son annexion du cinéma hollywoodien et de la musique pop anglo-saxonne. On est d’emblée dans la contemporanéité, les jeunes protagonistes de Lugar Publico assouvissent leurs désirs sexuels au son de diverses musiques dans des lieux propices aux rencontres licites ou non. L’homosexualité tiendra une place importante dans ce premier roman, alors que dans PanAmérica, elle est moins fortement affirmée. On retrouvera dans Hitler 3° Mundo et dans les pièces de théâtre, différents personnages homosexuels aussi provocateurs, qui s’affirment dans la transgression. Cette transgression des règles et des comportements permet de dénoncer l’hypocrisie d’une société qui n’accepte pas la sexualité de sa jeunesse. La provocation est une arme à laquelle recourt l’écrivain-cinéaste : un dictateur homosexuel un peu ridicule apparaît dans Hitler 3° Mundo ;dans The United Nations, des body-builders dorés viennent interrompre le déroulement de la pièce, en griffant les visages et les torses à portée de leurs ongles ; dans PanAmérica, les danseurs homosexuels mettent leurs culs en avant, Cassius Clay devient homosexuel, Winston Churchill ne pouvant pas s’arrêter de péter provoque la destruction d’un pavillon exposant des testicules géants, avant celle de New York.
Si le protagoniste principal du début de PanAmerica est un cinéaste, cela n’augure en rien du devenir de l’auteur. Les films qu’il fera ne relèvent pas de l’esthétique du cinéma qu’il décrit. Le cinéma qu’il décrit est un cinéma de grand spectacle, qui recourt à des moyens considérables, qui ne ménage pas ses effets. Il le démythifie cependant à travers la description délirante de ses mécanismes de production. La critique se manifeste par la surenchère spectaculaire ; comme si le spectacle ne pouvait s’abolir que par et dans son excès. L’excès est constant dans son œuvre de As Nacões Unidas, PanAmérica, Tarzan Terceiro Mundo, en passant par Planeta dos Mutantes où Rito do Amor Selvagem. Sa critique dénonce l’impérialisme culturel qu’exprime le cinéma hollywoodien et qui reflète le pouvoir qu’exerce économiquement et militairement les États-Unis sur le monde dans les années 60. Alors que dans Lugar Publico, il critique le cinéma de la nouvelle vague, dans PanAmérica il travaille sur l’excès produisant un simulacre de film hollywoodien. La question du simulacre est d’ailleurs essentielle pour comprendre ce qui se trame dans l’œuvre de José Agrippino de Paula. Elle motive la polyphonie des actions.
Cette polyphonie fait du collage le moment constitutif des processus de production et de réception de l’œuvre. On en retrouve une autre manifestation dans le travail sonore dans les séances de musique improvisée dont on garde la trace à travers un enregistrement11 ou bien dans les spectacles et dans Hitler 3° Mundo. On se souvient que pour José Agrippino de Paula le collage se comprend à partir d’un concept cinématographique,le mixage. Dans le texte de présentation de Rito do Amor Selvagem, il se réfère à cet usage du mixage comme élément dynamique et spécifique de la création du groupe Sonda. Le mixage devient le principe de montage même. Ces techniques de montage et de mixage sont à l’œuvre dans son long métrage.
Hitler 3° Mundo a été réalisé en 1969, avec la plupart des membres du groupe Sonda. Il a été fait alors que Jorge Bodansky et José Agrippino de Paula ont filmé la pièce Le balcon, dans l’adaptation de Victor Garcia. Lorsque Zé Agrippino se lance dans la réalisation de ce premier film, il a besoin de trouver quelqu’un qui puisse filmer pour lui. Il n’a jamais utilisé de caméra. Le désir de faire des images qui sont avant tout des images mentales comme c’est le cas dans les romans ou bien le résultat d’un processus de création collective dans les happenings, nécessitera un autre mode de collaboration que celui qu’il avait expérimenté jusqu’alors. Le principe du mixage sera appliqué à toute les phases de la production de ce film, qui restera une expérience singulière et formatrice non seulement dans la carrière de Zé Agrippino mais aussi pour certains de ses participants et principalement pour Jorge Bodansky. Ce film est un objet unique dans le paysage cinématographique brésilien, situé en dehors du cinéma marginal même s’il y a été rattaché. Une autre particularité de Hitler Terceiro Mundo tient au fait qu’il n’a été découvert au Brésil que plusieurs années après sa réalisation; il a été projeté publiquement pour la première fois en 1984. Ce qui explique qu’à la différence d’autres films, il n’a pas eu à subir les foudres de la censure.
A côté du cinema novo, le cinéma marginal12 apparaît comme une alternative, il semble tourner en dérision les déclarations de Glauber Rocha qui dans le manifeste de la faim dit que: « Par le cinema novo : le comportement exact d’un famélique, c’est la violence, et la violence d’un famélique, ce n’est pas du primitivisme. Fabiano est-il primitif ? Antão est-il primitif ? Corisco est-il primitif ? …/… une esthétique de la violence, avant d’être primitive est révolutionnaire, voici un point de départ pour que le colonisateur comprenne l’existence du colonisé ; seulement en conscientisant sa possibilité unique, la violence, le colonisateur peut comprendre, par l’horreur, la force de la culture qu’il exploite. Tant qu’il n’a pas levé les armes le colonisé est un esclave : il fallut un premier policier tué pour que le Français aperçût un Algérien.»13
Nombre de films du cinéma marginal ne montrent pas directement la misère, mais prennent de la distance avec la réalité et utilisent la parodie et la dérision; dans ces films abondent citations et recyclage des images ;l’humour et la sexualité y tiennent une place importante. Par contre, le cinema novo montre la misère et la révolte, et contredit les images et les discours de propagande du gouvernement et de la bourgeoisie , comme le fait Glauber Rocha dans Barravento (1961), autant qu’il ne présente pas les images attendues par les observateurs européens. Le cinéma marginal se distingue du cinema novo par son indépendance de production, et surtout par la radicalité de son langage cinématographique,même si certains films semblent appartenir à la même mouvance.
Le film de José Agrippino de Paula, est un objet étrange dans le domaine du cinéma marginal. Le poète a concrétisé, l’idée de faire un film lors de la production de Rito do Amor Selvagem. À cette époque Jorge Bodansky filmait Le balcon dans l’adaptation de Victor Garcia14 ; il se mit à la disposition de Zé, qui « ne savait pas expliquer exactement ce qu’il voulait, ni ne comprenait tout à fait les conditions techniques indispensables à la réalisation d’un film. 15» Tout en lui précisant qu’il aurait besoin pour filmer de trois choses : «une caméra disponible; des chutes de pellicules vierges provenant d’autres tournages et d’un engin de locomotion qui était en général un Combi VW prêté».
Le tournage du film, dans la clandestinité, a duré un an, en fonction de l’argent et de la disponibilité des protagonistes et du caméraman. L’improvisation dominait. « Tous les matins on sortait sans savoir ce qui arriverait jusqu’au soir.16» On retrouve dans ce film de nombreux participants du Tarzan III Mundo – O mustang Hibernado et des extraits de scènes sont incorporés au script de Rito do Amor Selvagem, comme par exemple la scène de bacchanale et du mariage.
Lorsque José Agrippino de Paula se lance, il n’a pas idée de la forme que prendra le film; seul le désir de faire un film le motive. Le film juxtapose des événements où des personnages sont confrontés à la foule anonyme d’un espace public, des scènes d’intérieur étouffantes, des plans qui servent d’interruptions ou d’inserts, dans lesquels l’espace urbain du São Paulo des années 60 surgit avec plus ou moins de force. Il s’agit d’un espace urbain chaotique dans lequel les terrains vagues ou les friches laissent apparaître en arrière fond des pans de ville en construction, blocs d’immeuble, tours, voies de circulation. La ville en devenir voit augmenter à sa périphérie ou dans ses interstices des favelas ou des zones en friche : plus tout à fait la campagne, autre chose. (On en voit aussi la trace chez Glauber Rocha ou Ivan Cardoso17.) Il s’agit de la représentation de l’espace urbain d’un pays émergent un pays en devenir dans lequel le tissu urbain n’est pas organisé mais semble répondre à une dissémination plus proche de la pollinisation que de la planification, qui fait se côtoyer par exemple un immeuble moderne et un fleuve à sec devenu égout.
On ne suit pas la déambulation d’un personnage à travers une ville comme on le fait dans Pestilent City (1965) de Peter Goldman, The Flower Thief ou The Queen of Sheeba Meets The Atom Man (1963)de Ron Rice. Des blocs de scènes s’opposent ou s’affrontent selon une dynamique que renforce la bande sonore. Cette dernière est un élément actif du démontage cinématographique ; sa richesse évoque les nombreuses personnes qui y ont travaillé. Dans un clin d’œil malicieux, Zé Agrippino , crédite au générique José Mauricio Nunes18 comme auteur de la bande-son. La bande-son reflète une grande diversité d’approche et d’usages de la matière sonore. On passe du chuchotement à des manipulations sonores (comme par exemple l’inversion du déroulement de la bande son) ou des plaquages de musiques pop de l’époque, comme Jimmy Hendrix. Tout le monde a voulu s’approprier la bande-son mais en dernier ressort comme le confirme Jorge Bodansky, c’est José Agrippino qui a le dernier mot. A la suite du non paiement du négatif à un laboratoire, les techniciens montèrent le son à l’envers. Il a fait sien cet imprévu en gardant quelques-uns de ces passages.
Parfois, les commentaires de Hitler Terceiro Mundo en voix off, évoquent les modulations de la voix de Jack Kerouac jouant tous les rôles de Pull My Daisy (1959), parfois, la voix convoque la poésie concrète. La dynamique de la performance parlée signale la présence du corps, autrement. Les récits postsynchronisés ne s’attachent pas à coller à l’évènement filmé, ils sont des commentaires sur l’image et autour d’elle, comme ceux qui mettent en scène Jack Smith dans Blonde Cobra,1963, de Ken Jacobs. Le commentaire déréalise le présent filmé au profit d’une autre temporalité hétérogène, qui s’inscrit en porte à faux avec celle du tournage. Par cet écart, le corps du locuteur acquiert une autre présence et rivalise avec ceux à l’écran. Ce dialogue rejoué induit une distanciation de l’action représentée. L’adhérence, si tant est qu’elle ait jamais existé, est abolie au profit d’une juxtaposition disharmonique. Le processus n’est pas occulté mais il n’est pas pour autant revendiqué. Le commentaire actualise ce qui n’est pas à l’image, jouant avec le statut de la voix off. Il déplace plus qu’il ne substitue et permet de regarder l’image, autrement. Une pluralité temporelle s’affirme alors au sein de l’image, qui ne mime pas la réalité, mais façonne une réalité cinématographique spécifique.
La richesse sonore à l’œuvre dans Hitler Terceiro Mundo est issue du travail réalisé dans les spectacles précédents, dans lesquels on trouvait une grande variété de sons19 : des sons électroniques live jusqu’aux musiques enregistrées,au collage de discours et de diatribes politiques qui évoquent les cut-ups de William Burroughs. L’intégration méticuleuse du son aux autres composants des spectacles: danses, lumières, théâtres, cirque, vise à produire un art-somme (Arte-soma), pour reprendre les termes de José Agrippino de Paula et Maria Esther Stockler. Cette pratique est réactualisée dans Hitler Terceiro Mundo.
Le film est composé d’une suite de séquences explorant différents effets du pouvoir. Après une brève introduction dans une cuisine mettant en scène un homme en complet, le film prend son essor avec une séquence dans laquelle une situation absurde se développe évoquant le cinéma d’avant-garde américain de la fin des années 40 et 50. Un homme et une femme dans une Coccinelle à l’arrêt font semblant de rouler, sautant sur leurs sièges comme s’ils avaient crevé. A partir du moment où ils se retrouvent chez le garagiste pour changer le pneu, le film abandonne tout réalisme pour évoluer dans un champ particulier, le Pop fantastique particulier à José Agrippino de Paula. Les scènes se succèdent en dehors de toute logique, privilégiant ruptures et accidents. Le caractère politique très fortement marqué a souvent été minimisé au profit d’une lecture qui privilégie l’originalité de la proposition cinématographique, selon la définition qu’en donne Jairo Ferreira dans O cinema da invenção : «Le cinéma de l’invention s’empare de toutes les caractéristiques existantes et les transfigure en de nouveaux signes selon une permutation esthétique: il s’agit d’un cinéma qui s’intéresse aux nouvelles formes pour de nouvelles idées, aux nouveaux processus narratifs pour de nouvelles perceptions qui conduisent à l’inespéré, explorant de nouvelles ères de conscience, relevant de nouveaux horizons de l’improbable.20» Les films, tout au moins pour les deux projets de l’année 69, Hitler Terceiro Mundo et Rito de Amor Selvagem21 prolongent les chemins innovants des pièces que ce soit au niveau de la production et de la performance. Dans le film de nombreuses scènes utilisent des clichés sur la torture, ou parodient le faste des mises en scène d’une dictature dans un stade, ou bien la ridiculisent. On peut citer la scène de signature du décret d’exécution, ou celle dans laquelle la mère du condamné vient réclamer sa levée chez Hitler. Elle surgit alors qu’Hitler et son amant se lavent dans une minuscule salle de bain. L’improbabilité d’une telle rencontre relève autant d’une proposition poétique que d’une approche dans laquelle la politique est inséparable de la quotidienneté. José Agrippino de Paula, questionne dans ce film, l’enfermement des êtres dans les institutions psychiatriques, policières et militaires. Il ausculte la société brésilienne après quelques années de dictature en décrivant des comportements extraordinaires envers des passants dans des lieux publics : favela, gare, et autre immeuble de São Paulo. Un énorme samouraï distribue des légumes à des enfants d’un bidonville, comme si ceux-ci étaient de vulgaires animaux de zoo, avant de les entasser dans un Combi pour traverser la ville; il improvise une danse avec un sabre dans des galeries marchandes, devant un public médusé22 ; des policiers capturent «La Chose» dans le quartier du marché municipal près de São Bento. Comme le dit l’auteur en 2000 ou 2003 : «Hitler, Terceiro Mundoé um filme, antes de mais nada, politico.23»
Faire appel aux forces de l’ordre à un moment où beaucoup de Brésiliens les évitaient, est pour le moins ironique, mais reflète aussi cette caractéristique du détournement. La capacité d’un personnage à contourner, son expertise à dribbler la loi, les interdits, s’illustre par l’incorporation des forces de police dans l’action du film qui dénonce les dérives d’un régime autoritaire. Sa capacité à manier l’imprévu et lui permet de se saisir de tout accident et on la retrouvera à l’œuvre dans ses films super 8 réalisés en Afrique.
Les modes d’appropriation qu’utilise José Agrippino de Paula, évoquent dans un premier temps le concept d’anthropophagie d’Oswald de Andrade, et semble relativement éloigné de la compréhension qu’en a Hélio Oiticica sauf en ce qui concerne la dilatation, ou le Pénétrable qui est un « projet d’environnement…/… une sorte de champ expérimental avec les images.» Un tel projet «elle contribue fortement à l’objectivation d’une image brésilienne otale, em même temps qu’elle détruit le mythe universaliste de la culture bérsilienne, totalement calquée sur l’Europe et l’Amériue du Nord, dans un “arianisme” dénué de sens: em vérité ce que j’ai voulu avec Tropicalia, c’est créer le mythe du métissage.24» Dans Tropicalia, c’est l’expérience que font les spectateurs de l’environnement qui est en jeu. Cette expérience préconise la participation et induit une dilatation des capacités sensorielles habituelles des spectateurs. La dilatation de l’expérience reflète une transformation des processus perceptifs due aux drogues. Le flux d’images chez Zé Agrippino illustre cette absorption qui digère les références, dilate les consciences, explose la temporalité. Si Agrippino de Paula s’empare de l’image et joue avec quelques références Pop, il le fait selon un registre qui affirme « c’est la proposition d’une libérté individuelle extrême en tant qu’une seule voie pour vaincre cette structure de domination articulée sur la consommation culturelle la plus aliénée qui soit.25» Ainsi les images glissent, les usages se déploient annexant la spécificité brésilienne à une radicalité des propositions. On pense à l’une des dernières séquences de Hitler Terceiro Mundo, qui voit le Samouraï tenter de rayer les images diffusée à la télévision, et qui n’y arrivant, se fait harakiri. Chez Zé Agrippino les choses s’emboîtent plus qu’elles ne sont assignées, désignées; elles sont toujours dans le flux et en ce sens elles entraînent une transformation constante de la perception, ou plus encore elles manifestent cette transformation comme processus du flux. José Agrippino de Paula travaille selon le registre de la métamorphose tel que définit par Michel Foucault «La métamorphose dont le point de mire, de tout temps, fut de faire triompher la vie en joignant les êtres ou de tromper la mort en les faisant passer d’une figure dans l’autre. 26» Cette pratique de José Agrippino de Paula, préfigure l’usage contemporain du morphing, dans lequel les constituants d’une image se transforment afin d’en configurer de nouvelles. Ces mutations d’images sont autant une réponse qu’une résistance à l’impérialisme culturel : ne plus subir les images, mais les faire siennes. Il y a bien globalisation, mais elle est modifiée; l’inscription dans la circulation des icônes s’effectue selon des registres qui ne dépendent plus des pouvoirs de communication, mais de l’imagination et d’une perception flottante. Hitler Terceiro Mundo annexe autant qu’il disjoint les actions et les personnages.
Il ne reste plus que quatre super 8 de José Agrippino de Paula. Trois ont été réalisés en Afrique lors du séjour de deux ans qu’il y a fait avec sa compagne avant de rejoindre New York en 1973 et relèvent du film de danse. Deux sont des captures de rites de possession du Candomblé au Dahomey et au Togo. Alors que le troisième Maria Esther: Danças na Africa (1972) propose différentes chorégraphies de Maria Esther dans des environnements quotidiens : une chambre donnant sur une plage, les toits d’une maison en Afrique du Nord.
Le travail en super 8 se démarque des films précédents dans la mesure où son approche est plus documentaire. Le poète filme des rites et des danses de possession. Son approche peut s’apparenter à celle de Maya Deren filmant à Haïti. Si José Agrippino de Paula capture des rites, il ne fait pas œuvre de film-rituel. On se souvient que pour Maya Deren le rite inscrit une dépossession de soi, que la cinéaste traduira au moyen d’une capture chorégraphique. Si les métrages de Deren autour du vaudou avaient été envisagés comme partie d’un ensemble plus large d’un film collage, ce n’est pas le cas des films super 8 de José Agrippino de Paula. Dans les films de Candomblé, dans celui de Maya Deren sur Haïti et dans quelques films sur la transe de Jean Rouch, le rôle de la caméra est prépondérant. Elle participe à la dynamique de la transe alors qu’elle capture l’ensemble du phénomène collectif. Chez Jean Rouch, le projet ethnographique fonde le filmage alors que la position du cinéaste modifie la neutralité convoitée. La maitrise des outils conditionne la souplesse de la capture. C’est bien au travers de cette expérience de libre capture, de pertinence dans la capture, de maîtrise de l’improvisation que s’inscrivent les films super 8 de José Agrippino de Paula. Si la connaissance du sujet filmé, par exemple un rite, pouvait constituer pour Maya Deren ou Jean Rouch une condition nécessaire au tournage, cela ne semble pas être le cas de José Agrippino de Paula qui partage avec Chick Strand cette faculté qui fait «aller vers ce qu’il y a de mieux», «sans être aveugle à ce qui est important, par une notion de ce qui sera important. 27» On retrouve dans les quelques films de Zé l’affirmation de l’improvisation, qui favorise les tournés montés, ou les rapides balayages d’une scène montrant la personne en transe et les membres de la communauté qui l’entourent, l’accompagnent. La caméra est constamment en mouvement, passant du gros plan d’une femme dansant à la foule en retrait, devant des cases, pour revenir à cette même femme en la positionnant vis-à-vis des musiciens. Les plans se succèdent ,alternant plans rapprochés des participants et plans plus larges, comme les premières séquences de Candomblé no Dahomey (1972). La caméra portée à bout de bras oscille entre des contreplongées des danseurs et des vues à hauteur d’homme. José Agrippino de Paula capte ce qu’il peut au moment ou cela se déroule. Il n’organise pas le matériau afin de nous faire comprendre le rite, il ne fait pas œuvre ethnographique. Il filme tout simplement ce qui se passe, là où il est. Son approche du sujet est tactile autant que chorégraphique. Il joue avec la maniabilité du super 8, qui lui permet d’être au plus près de ce qu’il filme sans paraître intrusif. Les balayages dans les deux films Candomblé no Dahomey et Candomblé no Togo (1972) se jouent des expositions et de la netteté. La granularité de la pellicule est plus ou moins prononcée selon l’exposition et les mouvements de caméra. Les bandes-son ne semblent pas synchrones et paraissent avoir été ajoutées après coup, même si certaines percussions ont pu être enregistrée au moment du filmage.
Les deux autres films évoquent le personal cinema, et plus particulièrement le cinéma de Stan Brakhage. Un cinéma à la première personne, un cinéma qui ouvre les yeux au monde et fait du monde un champ d’expérience visuelle. Un cinéma visionnaire, qui nous fait découvrir par ses cadrages, par ses rythmes, la beauté d’un paysage, la subtilité d’un mouvement, l’éclat d’un reflet d’un corps dans l’eau comme dans Céu sobre Água. Après son retour d’Afrique José Agrippino de Paula change sa manière de filmer; il privilégie ce qu’il nomme des « takes impresionistas » , attendant des heures afin de capter une lumière adéquate, un nuage…Les films super 8 de José Agrippino de Paula se distinguent de la production brésilienne Super-8 des années 70, non seulement par la diversité des approches28auxuelles il recourt, mais aussi par leurs factures qui mêlent au document une dimension de diariste. En effet, ses films ne relèvent pas d’une approche formelle ni conceptuelle, mais partice-pent plutôt d’une esthétique du corps, que l’on retrouve chez certains cinéastes brésiliens plus que que chez des plasticiens. Le corps n’est pas instrumentalisé, il advient au moyen du film. Ses films super 8, ont ceci de particulier qu’ils mettent en avant la production d’un corps « commun », un corps partagé. Un peu à la manière dont l’enregistrement des improvisations musicales se fait l’écho au travers d’une polyphonie qui ne souligne pas tant tel ou tel instrument que leur association en vue d’un objet particulier, un corps qui respire et se contorsionne selon les pulsations rythmiques. On trouve ce même phénomène dans les films super 8, qu’ils s’agissent de capture de rites de candomblé ou d’une danse improvisée par Maria Esther. Le film ne peut exister que dans et par la relation qui se crée entre les différents éléments qui le composent selon un jeu de responsabilité réciproque. Le cinéma devient alors l’instrument d’une quête, un alibi pour une déambulation mentale.
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1Publiée en 1967 à São Paulo, en français aux Éditions Leo Scheer Paris 2008
2Publié en 1965, réédité en 2004, Editora Papagaio
3 « formação em arquitectura tem todo a ver com a cenografa.” c’est nous qui traduisons, inJulio Bresanne et Joca Reiners Terron, 2002
4José Roberto Aguilar est peintre, vidéaste, organisateur de spectacles, sculpteur, écrivain, musicien et commissaire d’expositions. Autodidacte, il fait partie du mouvement littéraire Kaos, en 1956, avec Jorge Mautner et José Agripino de Paula. Voir encyclopédie Itaú cultural, arts visuels
5Avec Helena Vilar et Iolanda Amadei
6«as autoridades falando sempre coisas que (…) não tem interesse (…) nem muita sinceridade, quer que (…) as pessoas nem ouvem(…)»Maria Esther Stockler , interview donnée à Maria Theresa Vargas, Archive Multimeios, CCSP
7Revue Veja, n° 1702 du 30 mai 2000, p 142
8Appropriation à partir du film Conquest (1937), Charles Boyer est Napoléon et Greta Garbo, la comtesse Walewska.
9Sur ce concept voir Gilles Deleuze :Logique du sens, Les éditions de minuit, Paris 1969
10A partir de 64, le Brésil sous la dictature connait une expansion galopante, mais dès 65 les libertés civiles sont réduites et le président et vice président sont désignés par le Congrès.
11Un cd d’une séssion de musique improvisée, doit être lancée cette année sous l’égide du SescSP, sous la direction de Lucilla Mereilles, ce cd accompagne la sortie d’un dvd de quelques films de José Agrippino de Paula.
12Le cinema marginal n’est pas un mouvement mais plutôt un regroupement de cinéastes qui apparaissent après le coup d’état militaire et après les premieres films du cinéma novo. Il partage avec le cinéma beat et underground un goût partriculier pour le kitsh, l’outrance la parodie et se focalise sur des déclassés, les oubliés de la représentation en contestant les formes cinématographiques. Le nom provient certainement du film A Margem de Ozuado Candeias, 1967. Cinema marginal de Fernão Ramos, Embrafilme Ministerio da Cultura 1987, Cinema Marginal e suas fronteiras Eugenio Puppo e Vera Haddad Centro Cultural Banco do Brasil 2004, 2009
13Glauber Rocha : « Uma estética da fome ». Revista Civilização Brasileira, Rio de Janeiro 1(3) 165-170, jul 1965
14Metteur en scène argentin, qui a monté au Bérsil Le Balcon,produit par Ruth Escobar dans un théâtre de Sao-Paulo et dont on garde quelques traces à travers un document cinématographique.
15Jorge Bodansky, interviewé par Lucila Meirelles, pour la Sesc TV octobro 2008.
16Idem « A gente saía de manhã sem ter idéia do que ia acontecer até o final do dia.”
17Cinéaste brésilien, qui réalise en super 8, en 1971 Nosferatu no Brasil avant de se consacrer aux séries Z parodiant et annexant différents genres cinématographiques.
18Prêtre afro brésilien, musicien organiste 1767-1830; il est l’un des premiers compositeurs à incorporer la musique populaire brésilienne (modihnas: sérénades) dans ses œuvres profanes et religieuses.
19On retrouve dans les enregistrements d’improvisations de José Agrippino de Paula, cette grande variété sonore ou se cotoie aussi bien des échos de Ravi Shankar, à des rytmiques de candomblé sur des instruments domestiques verres, cuillères…, pop musique, et détournement de la Bachianas Brasileiras n° 5 d’Hetor Villa-Lobos.
20 Cinema de invenção p 23, de Jairo Ferreira, editora Limiar, São Paulo 2000
21Film perdu.
22On se souvient que dans le triple écran de Toshio Matsumoto de 1968, on retrouve des regards médusés face aux happenings dans les rues de Tokyo.
23In Miriam Chnaiderman : Panaméricas de Utópicos Embus – acolhendo enigmas in Rivera, T. e Safatale, V. Sobre arte e psicanálise, SP, Escuta.(101-112)
24Tropicalia 4 mars 1968, Hélio Oiticica, in Catalogue du Jeu de Paume, Paris 1992, p 125
25Tropicalia Idem p. 126
26In Raymond Roussel p 111, Michel Foucault , Gallimard, Paris 1963
27Chick Strand : Notes on Ethnographic Film by A Film Artist, p 51, Wide Angle vol 2, n°3 , Athens 1978
28 Sur la diversité de ces approches de cet important corpus voir Rubens Machado Jr : Márginalia 70, O experimentalismo no Super-8 Brasileiro, Itaú Cultural São Paulo 2001